Les supérettes Api font revenir le commerce dans les villages Abonnés
La Lettre du Maire : pouvez-vous nous raconter l’origine des supérettes Api ?
Julien Nau : nous nous sommes inspirés d’une expérience menée dans le nord de la Suède, avec l’objectif de nous installer dans les campagnes, là où nombre d’habitants ne peuvent pas faire leurs courses sans prendre la voiture. Notre initiative peut aussi intéresser les maires soucieux de préserver des lieux de convivialité. En effet, 38 % des personnes vivant en milieu rural ne parlent qu’à une personne voire à aucune dans leur journée, faute de lieux d’échange. La supérette Api peut devenir ce lien.
Notre première supérette a été installée en Aquitaine, puis nous nous sommes développés dans la région des Pays de Loire et bientôt en Normandie. En l’espace de deux ans, nous avons ouvert 65 supérettes. Il y en aura 100 à la fin de l’année 2024.
La LDM : les maires intéressés peuvent-ils vous contacter ?
Marie-Laure Basset : oui, sachant que nous ouvrons une supérette dans des communes de 750 habitants minimum, voire 550. Notre premier critère de choix est une distance de 10 minutes en voiture du supermarché. Autre critère : la possibilité d’un maillage dans la région car la gestion des supérettes est assurée par un « apicier » (nous avons recruté une soixantaine de salariés à cet effet) qui s’occupe, en moyenne, de 3 supérettes. Il faut donc qu’elles ne soient pas trop éloignées les unes des autres. Pour l’instant, nos supérettes s’installent sur la façade ouest, mais nous pouvons nous implanter ailleurs. Cependant, dans cette hypothèse, notre modèle exige une démarche collective pour déployer plusieurs supérettes.
La LDM : il y avait autrefois des épiceries dans les villages. Elles ont fermé. Pourquoi échapperiez-vous à ce destin ?
M-L.B : parce que notre modèle n’est pas le même. Tout d’abord, il n’y a pas d’agent présent dans la supérette. Pour financer leurs charges, les épiciers traditionnels devaient vendre 30 % plus cher que les supermarchés, ce qui les condamnait. Ce n’est pas notre cas : nous proposons nos produits à des prix comparables à ceux des grandes surfaces (Carrefour est d’ailleurs pour une large part notre fournisseur).
La LDM : comment se présente votre supérette ?
M-L. B : nous installons facilement un mobil-home sur le territoire de la commune : il ne faut pas plus de huit jours pour que le mobil-home quitte notre siège pour rejoindre la commune. Le magasin comporte une seule allée. On y a accès par un QRcode. On fait ses achats et on paye avec une carte bancaire. Le magasin est donc accessible 7 jours sur 7, 24 h sur 24.
A.T : on pourrait avoir le sentiment que la population des villages, souvent âgée, est réticente à l’idée d’utiliser ces modes d’accès et de paiement, mais c’est un préjugé : dans nos communes d’implantation, 83 % des habitants ont ouvert un compte Api.
M-L. B : le magasin propose 700 produits, des produits alimentaires, y compris des produits frais, des produits d’entretien, bref tout ce qui est nécessaire à un ménage. Seule limite : nous ne vendons pas d’alcool car cela nécessite de contrôler l’âge du client. Et nous ne voulons pas que le magasin soit un moyen pour des jeunes (ou des moins jeunes) d’avoir un accès facile à l’alcool.
La LDM : l’installation d’une supérette a-t-elle un coût pour la commune ?
J.N : non, nous avons uniquement besoin d’un terrain de 100 m2 alimenté par l’électricité. Nous demandons juste à la commune de financer l’inauguration, occasion pour les habitants de se retrouver. Notre modèle est récent, il est donc encore en développement, mais nous travaillons déjà avec des producteurs locaux qui approvisionnent nos supérettes en fruits, légumes ou viandes. Et, à terme, nous voulons rendre d’autres services pour que la supérette devienne un véritable lieu de convivialité, que les gens s’y rencontrent, s’y croisent. Ainsi, avec Pickup, filiale de La Poste, nous venons d’ouvrir un service de retrait et de dépôt de colis en consigne, et on peut aussi imaginer un espace de petites annonces.
Michel Degoffe le 10 septembre 2024 - n°512 de La Lettre du Maire Rural
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